Actualités

Côte d’Ivoire 2025 : vers des élections verrouillées par le calendrier ?

Avec plus de 8,7 millions d’inscrits sur la liste électorale définitive, la Côte d’Ivoire aborde un tournant décisif à cinq mois de la présidentielle prévue pour le 25 octobre 2025. L’annonce faite par le président de la CEI (Commission électorale indépendante), Ibrahime Coulibaly-Kuibiert, confirme une dynamique d’élargissement du corps électoral, marquée par l’ajout de 715 000 nouveaux électeurs depuis 2023. Un chiffre qui reflète à la fois l’intérêt renouvelé des citoyens pour les enjeux électoraux et les efforts administratifs fournis pour moderniser le fichier électoral.

Mais derrière cette avancée apparente se cachent des tensions profondes. L’opposition dénonce l’absence d’une nouvelle révision de la liste, malgré la radiation controversée de certains opposants majeurs. Le débat technique devient politique, posant une question centrale : la présidentielle 2025 pourra-t-elle se tenir dans un climat de confiance et d’équité démocratique ?

Une progression numérique, mais un débat démocratique inachevé

L’augmentation du nombre d’inscrits constitue indéniablement un progrès en termes de participation potentielle. Elle témoigne de la capacité de la CEI à organiser et digitaliser des opérations complexes d’enrôlement à l’échelle nationale. Cette performance technique aurait pu être saluée à l’unanimité si elle ne survenait pas dans un contexte de méfiance persistante vis-à-vis de l’institution électorale.

Congrès extraordinaire PDCI-RDA : une élection express pour relégitimer Tidjane Thiam ?

La critique majeure émane du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) et de la coalition CAP-CI, qui exigent une nouvelle opération d’enrôlement, jugée indispensable pour garantir l’inclusivité du scrutin. Leur argument est double : d’une part, les délais initiaux auraient empêché des centaines de milliers de citoyens, notamment les jeunes primo-votants ou ceux vivant en zones reculées, de s’inscrire ; d’autre part, la radiation judiciaire de certains opposants alimente un sentiment de sélection politique. Pour Tidjane Thiam, figure montante de l’opposition, cette révision est une condition de légitimité du scrutin.

Lire Aussi : Thiam lâche la barre du PDCI : repli tactique ou renoncement politique ?

Un équilibre délicat

La CEI, de son côté, campe sur sa position institutionnelle. Pour son président, une révision électorale prendrait en moyenne six à sept mois, un délai désormais incompatible avec le calendrier constitutionnel. Au nom de la stabilité du processus et du respect de la date du scrutin, elle refuse toute modification du fichier. Juridiquement, l’argument se tient. Politiquement, il reste fragile.

L’affaire est d’autant plus sensible que la radiation d’opposants par décision de justice bien que techniquement indépendante est perçue comme une manœuvre politisée par une partie de l’opinion publique. La CEI, en exécutant ces décisions sans marge de négociation, s’expose à une crise de confiance à l’approche du scrutin. Le risque ? Une remise en cause des résultats, une contestation de la légitimité des autorités issues du vote, voire une instabilité post-électorale.

Cacao ivoirien : un prix record qui cache de profonds défis

Dans cette atmosphère crispée, la collecte des parrainages, qui devrait débuter prochainement, pourrait déjà être marquée par des tensions si certaines candidatures peinent à émerger faute d’inscriptions validées ou en raison de contentieux juridiques non résolus. À cinq mois d’un scrutin crucial, la Côte d’Ivoire semble avoir accompli une prouesse technique, mais l’essentiel du défi demeure politique. Une liste électorale étoffée ne garantit pas à elle seule un processus électoral apaisé. La confiance dans les institutions surtout en la CEI, la transparence des procédures et le traitement équitable de toutes les candidatures seront les véritables juges de paix de la présidentielle de 2025. En l’état, la démocratie ivoirienne avance, certes, mais sur une ligne de crête.

Tony A.

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page