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Africa Corps : Le Kremlin accélère sa stratégie africaine

Le départ annoncé du groupe paramilitaire Wagner du Mali marque un tournant significatif dans la présence russe en Afrique. Alors que cette organisation controversée, liée à Evgueni Prigojine, quitte un terrain où elle était active depuis 2021, une nouvelle entité, l’Africa Corps, sous le contrôle direct du ministère russe de la Défense, prend le relais. Cette transition n’est pas qu’une simple substitution de forces paramilitaires. Elle s’inscrit dans une volonté affirmée du Kremlin de renforcer ses liens économiques et sécuritaires avec le continent africain, un pivot stratégique confirmé récemment par Dmitri Peskov, porte-parole du gouvernement russe.

À travers cette manœuvre, Moscou cherche à asseoir une présence plus structurée, officielle et durable en Afrique, en s’éloignant des zones d’ombre liées aux groupes privés militaires tout en s’implantant dans un contexte de rivalités internationales exacerbées. L’enjeu dépasse le cadre bilatéral. Il s’agit pour la Russie d’affirmer sa place dans un théâtre géopolitique où s’entremêlent influences occidentales, chinoises et désormais russes, dans un continent riche en ressources et en perspectives stratégiques.

Africa Corps, la mutation du modèle russe

Le retrait du groupe Wagner du Mali, malgré ses opérations controversées mais efficaces, reflète les limites du recours aux sociétés militaires privées dans une stratégie d’influence à long terme. L’émergence de l’Africa Corps, pilotée directement par le ministère de la Défense, traduit une volonté du Kremlin de professionaliser et de légitimer sa présence militaire sur le continent. Ce changement est crucial car il réduit la dépendance à des acteurs privés et opaques tout en facilitant un contrôle étatique plus rigoureux des opérations.

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Ce modèle permet aussi à Moscou de s’insérer dans les logiques étatiques africaines, en nouant des partenariats officiels, notamment dans la formation, la fourniture d’équipements et la coopération sécuritaire, domaines cités explicitement par Dmitri Peskov. Ce glissement est une réponse aux critiques internationales sur le rôle trouble de Wagner et un moyen de contourner les sanctions et condamnations qui affectent ces groupes paramilitaires. L’Africa Corps pourrait ainsi devenir un outil diplomatique et militaire plus souple, servant à la fois les intérêts économiques et les ambitions géostratégiques russes en Afrique.

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Enjeux économiques, sécuritaires et géopolitiques d’une implantation renouvelée

La stratégie russe vise clairement à exploiter la manne économique africaine, notamment via les investissements et la coopération économique mentionnés par Peskov. La Russie cherche donc à renforcer ses positions dans des secteurs clés comme l’énergie, les mines et les infrastructures, tout en soutenant des régimes souvent fragiles ou contestés, dans un contexte où la présence occidentale est parfois perçue comme déclinante ou conditionnelle.

Sur le plan sécuritaire, la coopération s’étend aux domaines sensibles de la défense, dans des pays où les enjeux de stabilité sont majeurs face aux insurgences, aux tensions ethniques ou aux pressions étrangères. La montée en puissance officielle de l’Africa Corps peut aussi être vue comme un contrepoids aux autres puissances militaires implantées sur le continent, notamment la France, les États-Unis ou la Chine. Par ailleurs, le recrutement ouvert en Russie, annoncé récemment sur Telegram, suggère une intensification des opérations, peut-être au-delà du Mali, vers d’autres théâtres africains où Moscou entend étendre son influence.

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Un nouveau chapitre africain pour la Russie

La confirmation par le Kremlin d’une coopération accrue avec l’Afrique, incarnée par le remplacement du groupe Wagner par l’Africa Corps, marque un tournant stratégique majeur. Cette démarche s’inscrit dans une volonté de légitimation et de pérennisation d’une présence russe qui dépasse le simple mercenariat. Elle illustre également une nouvelle phase de compétition géopolitique sur le continent, où la Russie cherche à se positionner comme un acteur incontournable, jouant sur la complexité des contextes locaux et les faiblesses des acteurs occidentaux.

Pour les pays africains concernés, ce réalignement russe représente autant d’opportunités que de risques, entre promesses d’investissements et dangers d’une militarisation accrue. Sur la scène internationale, cette évolution appelle une vigilance accrue quant aux répercussions sur la stabilité régionale, dans un continent en quête d’équilibre entre souveraineté et influence étrangère.

Tony A.

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