Israël-Iran : une guerre lointaine, un choc immédiat pour l’Afrique
Alors que le bras de fer entre Israël et l’Iran s’intensifie, ses répercussions économiques ne se limitent pas au Moyen-Orient. Le continent africain, bien que géographiquement éloigné du théâtre des affrontements, se trouve dans une position de vulnérabilité structurelle face à ce nouveau front géopolitique. En cause, sa forte dépendance au pétrole, une inflation importée grandissante et une fragilité persistante des balances extérieures.
Les prix du pétrole brut ont déjà commencé à grimper, alimentés par la peur d’un blocage des routes d’exportation au Moyen-Orient, notamment dans le détroit d’Hormuz. Une évaluation récente de Goldman Sachs estime qu’un prolongement ou une intensification du conflit pourrait faire bondir le prix du baril de 10 dollars. Pour de nombreux pays d’Afrique subsaharienne, ce choc pétrolier s’annonce comme une menace directe pour la stabilité macroéconomique et sociale.
Vers une possible hausse du prix du pétrole : l’Afrique prise au piège d’un conflit externe
Pour de nombreux pays africains Sénégal, Kenya, Ghana, Côte d’Ivoire ou encore Éthiopie la facture énergétique repose sur des importations quasi intégrales de pétrole et de carburants raffinés. Or, l’augmentation des prix du brut du pétrole entraîne une pression immédiate sur les budgets nationaux et les réserves de change, déjà affaiblies par les crises post-Covid et les tensions sur les marchés mondiaux.
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L’impact est double. D’un côté, les gouvernements voient leur capacité à subventionner les carburants réduite, ce qui provoque mécaniquement une hausse des prix du pétrole à la pompe. De l’autre, les entreprises, notamment dans les secteurs du transport, de l’agriculture et de l’industrie légère, voient leurs coûts de production exploser. Cette dynamique risque d’alimenter une inflation galopante, difficile à contenir par les outils monétaires classiques.
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Inflation, tensions sociales et menaces sur la stabilité économique
L’onde de choc énergétique se traduit inévitablement par une flambée des prix de biens essentiels : denrées alimentaires transportées sur de longues distances, services publics dépendants du diesel (comme les générateurs en zones hors réseau), ou encore matériaux de construction. Dans des pays où le panier de la ménagère est déjà sous tension, chaque hausse du carburant se transforme en facteur d’exaspération sociale.
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À cela s’ajoute la pression sur les devises. De nombreux États africains, confrontés à la baisse des recettes fiscales et à la hausse des coûts d’importation, pourraient voir leur déficit commercial se creuser. Cela menace la soutenabilité de leurs dettes extérieures, et complique davantage l’accès aux financements internationaux. L’Afrique se retrouve donc exposée à un risque de ralentissement économique couplé à des troubles politiques locaux si la crise énergétique perdure.
Le conflit entre Israël et l’Iran illustre une fois de plus combien les économies africaines sont intégrées, souvent de façon désavantageuse, aux dynamiques globales. La dépendance aux énergies fossiles, l’absence de politiques de résilience énergétique et la faible diversification des sources d’approvisionnement rendent le continent vulnérable à chaque soubresaut géopolitique. Au-delà de l’urgence, cette situation devrait interpeller les gouvernements africains sur la nécessité d’investir dans des alternatives locales, notamment les énergies renouvelables, et de renforcer les politiques de sécurité énergétique. Car tant que l’Afrique importera ses vulnérabilités, elle subira les conflits des autres comme si elle en était l’épicentre.
Sandrine A.